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Le chien et ses puces
par Ann


Il était une fois des puces qui vivaient paisiblement sur un chien gras à souhait pas bien malin au pelage soyeux au sang si riche que c’en était chaque jour un régal pour le petit peuple occupé à sauter de poils en plaisirs et piquer son festin sans le labeur qui assèche la joie de vivre sans l’angoisse du lendemain qui déchante. C’était un ravissement que d’entendre les cantiques montés loin au-dessus des oreilles dressées de la Bête Promise aux soins d’un maitre attentif à son ange gardien à la longue toison brune. Le maitre prenait en tout, soin de son si fidèle compagnon, le nourrissait bien, lui offrait en récompense de longues promenades dans les champs de seigles balançant leurs barbes au gré de la brise dansante, dans les bois dorés quand venait l’automne et l’animal se roulait de plaisir de tant d’attention sur le pré baigné de rosée, sur le paillasson qui lui brossait agréablement le dos. Et puis l’animal prit cette fâcheuse habitude de folâtrer mais nos campagnes ne sont pas recouvertes que de vertes prairies, de chemins au sable fin, de tapis de mousses et de feuilles aux belles couleurs, le sol est jonché de carcasses de bêtes finissant de pourrir, d’offrandes chaudes et fumantes données par nos vaches à la Terre qui les engraissent ; le chien s’y roula et la bête fut promise à une toilette minutieuse. Le maitre montra du doigt un immense cuveau de tôle qui avait accueilli des générations d’enfants joyeux batifolant nus dans la mousse. Le cul posé sur le perron du jardin, le chien n’était pas sensible à l’eau tiède et parfumée mais il obéit, il obéissait toujours à son maitre qu’il chérissait plus que encore que la sieste au soleil de l’été ou auprès de l’âtre l’hiver, plus encore que l’attrayante lime du voisin. Il plongea et provoqua une vague d’écume savonneuse que ses hôtes les puces n’avaient jamais connue. Beaucoup se noyèrent de détresse et quelques-unes firent naufrage sur une éponge, radeau d’infortune. Elles ballotaient encore sur les eaux souillées tandis que le maitre frictionnait l’animal quand une puce plus éclairée cria à ses congénères accusant le ciel de leurs malheurs : « Quittons et sautons, rejoignons la bête de nos ancêtres ». Une petite voix zozotante dit « Mais c’est arch archi dangereux ! » Personne ne l’entendit, toutes sautèrent, beaucoup abandonnèrent leur vie au bouillon crasseux du cuveau. Les plus agiles sentirent de leurs pattes de nouveau la fourrure rassurante qui avait bercé leur enfance, elles crièrent leur joie retrouvée : « IL nous a sauvé des eaux, c’est un PRO ! Faisons-lui FETE et elles tombèrent à genoux la trompe dans la peau chaude de la Bête Promise à d’ardentes piqûres. Et le temps passa, le chien vieillissait d’une vieillesse faite de bonheur et le maitre sentant la fin prochaine rapporta au foyer un jeune chien tout juste sevré. Le vieillard lui offrit son torse velu en signe de bienvenue et d’amitié réciproque, le chiot qui pleurait les flancs de son aimante mère à qui on l’avait arraché s’y blottit tout naturellement.*Et le vieux lui enseigna le métier et toutes les ficelles d’une vie faite de plénitude et de justice. Les puces, filles des naufragées partirent en conquête sur le corps du nouvel animal car elles sentaient bien elles aussi que leur Bête était sous peu promise à un long sommeil et le vieux chien mourut et alla reposer sous la terre dessous le poirier, son préféré au temps où son flair guettait les innocents lapereaux, au temps où il courait derrière les chats, égoïstes bestioles préoccupées de leur seul bien-être. Le maitre pleura fort quelques jours, il trainait sa tristesse en cultivant son jardin, il avait perdu le goût des bonnes choses qui attendait la fin de son deuil pour lui sourire de nouveau et son jeune compagnon attendait selon les sages conseils de son précepteur canin. Pendant tout ce temps au dos du gardien novice, la guerre faisait rage car les conquérantes faisaient front aux puces indigènes, fées protectrices que le chiot avaient reçues de sa mère, ce jour béni, jour de sa naissance comme gage de longue vie. Les conquérantes devenues errantes par la force des choses prétendaient apporter la civilisation, alléguant d’une tradition perdue dans les nuits des temps que le jeune animal était leur. Les sauvages** sonnaient de la trompe, frappaient de leurs pattes et auraient préféré tomber comme des puces d’honneur sur les touffes de poils nourries de leur sueur que de céder ne serait-ce que la moitié d’une patte crottée. Le pauvre chien s’alanguissait sans oser le montrer à son maitre envahi par son chagrin récent mais la vie reprit le dessus, l’homme baissa la tête vers l’animal et une longue histoire d’amour, d’amitié, de complicité commença. Du regard à la caresse, le maitre comprit le mal qui rongeait la Bête qui fut avant la tombée du jour promise à une pulvérisation en règle qui coula dans ses veines. Et il n’entendit plus parler de ces guerrières affamées toujours plus de sang. Juste une puce, une toute petite puce, ange gardien fut sauvée du génocide. Et la vie reprit son cours.

Thème Bombes pour bombes insecticide sans va sans dire<br />
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* Je parle du chien. À la relecture et vous connaissant un peu chers lecteurs, je devance vos remarques moqueuses.<br />
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** Sauvages : nom donné par les Conquérantes aux Indigènes pas si sauvages que ça quand on y regarde d’un peu près


Poème posté le 04/12/10


 Poète
Ann



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