Négatifs
par Aodren
Elle était assoupie et ses courbes graciles
S’enroulaient en oubli dans une ombre miroir.
Combien de temps déjà ? Allaient-ils se revoir ?
Combien de temps encor, à rester immobile ?
Au travers de sa robe, pourtant, il aimait
Revoir les visages issus d’autres époques.
Son grand-père, aux fourneaux, affublé d’une toque,
Faisait chanter l’étain devant l’œil aux aguets
Du môme qui traînait, à l’affût d’un faux-pas,
Des fois qu’un peu de rab resterait dans le plat.
Il lui disait : « Petit ! J’ai des poêles à gratter ! »
Et son rire soudain le faisait tressauter.
Cette tranche de vie hurle dans le noir,
Dans les courbes graciles d’une pellicule.
Maintes fois, j’ai failli, lors de nuits Minuscules
Replonger à deux pieds dans ce maudit tiroir.
Mais ce gamin est mort, depuis ce jour d’été
Où le vieux a choisi de ranger ses gamelles
On ne l’entendra plus chiner le caramel
Coulant sur des quartiers de pommes épluchées.
Je sais, ma belle…Il faudra bien que j’y revienne,
Dans tes draps-souvenirs où j’aimais me lover
J’ai si peur de le voir en ces instants figés
Alors qu’il vit encor dans mon cœur porcelaine.
Je ne peux que t’écrire, en des mots bleus saphir
Que je ne t’oublie pas, au lointain qui se perd
Peut-être dans l’obscur, verras-tu la lumière
De cette encre en écume vibrant sur la lyre
Poème posté le 23/11/12