La tempête
par Vespertilion
Le ciel perle au noir ses groins et ses nasaux
Sur la ville en songe à la chair satinée
Et la rive murmure à l’œil ambre des eaux
Et le pont sans une âme invite la destinée
Le souffle du troupeau échevelle les rameaux
A la lisière du bief, sur la mousse, peau nue
J’allaite mon petit al-languie, ingénue
Qu’il est doux à mon sein de se sentir ruisseau
Le bestiaire fou du ciel vient humer mes parfums
L’ombre vibrante de l’air me frôle le creux des reins
J’enveloppe mon enfant, je le berce et m’enchante
Qu’il est bon de m’offrir au souffle qui me tente
A l’œil du sentier, des pas jeunes se pressent
Et la foudre claque quand des cils me caressent
Cet homme passe mon être au feu de ses prunelles
Qu’il est grand d’être nue et de me sentir belle
Qui est-il l’étranger, soldat ou bien poète
Prince, marchand ou clerc, artisan, paysan ?
Je sens battre son cœur et chavirer sa tête
Un signe de mes yeux et il est mon amant
Entre lui et moi, la gorge se fait profonde
Un courant qui porte tout le lait du monde
Je blottis mon enfant, nos yeux longtemps se scellent
La foudre fond entre nous dans l’onde qui ruisselle
Il reprendra son pas venu avec l’orage
Je me revêtirai comme une femme sage
Il a ravit mon cœur si loin dans les nuées
Pas une âme au pont n’invite la destinée.
Ce poème est inspiré du tableau de Giorgione (1505) "La tempête" (Galleria dell Academia - Venise)
Poème posté le 18/05/09