Frankfurt
par Domagoj sirotinja
Que cette arrivée m'a parue terrible en terre étrangère !
Quelle angoisse oppressante, anxiété de finir sous un pont
ou bien au fond d'un ravin ! Le jour était encore vacant
lorsque je me lançai à la recherche d'un hôtel dans ce
nouveau labyrinthe proposé. Je cherchais un endroit
simple et commode et pas cher et pour toutes réponses
j'essuyais des refus, constatais des prix exorbitants
à entretenir la névrose. Je ne savais plus quel acte
tenter pour conserver un plaisant optimisme et, après
bien des manoeuvres, j'ai réussi. Pourtant la fatigue m'a
plié le dos, s'est déportée sur mes épaules subtiles et ma
peau martelée par ces bretelles m'écrasant de quelques
millimètres. Au bord du Main, au bord de la mare,
épanchés dans les rues mes sentiments dévalaient en
cascade. Avez-vous déjà cru au mal qui vous guette, à un
sortilège qui s'apprête à vous tomber dessus comme s'il
s'évadait d'un nuage ? Que c'est bon de se tirer de pareils
signes misérables, que c'est bon de se sentir vivre !
J'apprécie la douceur de ses draps, la volupté d'un thé
assaisonné, la fluidité de mon écriture. Tout est comme
avant mon départ, dans un confort sécurisant. Le fait
de replonger dans des situations familières et maîtrisées
me rassure, et en même cet intermède stressant
m'interpelle... Etait-ce mieux avant ces déluges
d'embarras ? Le fait de réintégrer la position avant
évoque t-il un progrès ou au contraire une déterioration
de la condition décriée ? Ce retour à l'avant peut s'inter-
-préter comme un refus de percer le futur, une non-
assistance à un état de dégradation inhérent
à tout développement de la condition humaine.
@ Edi Sorić
Poème posté le 02/12/10