J’ai hérité d’une boule de poils, tout semblable à son lointain ancêtre. Et tout naturellement je le nommai Misti. Je rechignai bien un peu de ce cadeau que je savais finir un jour ou l’autre sous les roues d’une voiture. Car voyez-vous ce sont le genre de corvées qui me sont habituellement réservées puisqu’on a décrété une bonne fois que j’étais insensible aux chairs écrabouillées depuis que j’avais emmailloté avec sang froid un doigt de mon époux qui pendouillait lamentablement au bout de son propriétaire. Et pourtant même quand il s’agit d’un animal à ramasser, je finis toujours par une double rincette de calva pour me redonner couleur et courage à creuser un trou et des trous j’en ai fait. Mon jardin est un immense terrain de trous.

Je redoutais les sérénades félines quand reviendra l’été, les nuits d’été quand je cherche le sommeil les fenêtres grand’ouvert à la fraicheur nocturne et les petits matins quand j’ouvrirai ma porte sur un matou l’oreille pendante, une patte à moitié bouffée ou une queue cisaillée par un rival acharné à gagner les faveurs des belles du quartier. Je luttai alors contre mon éthique qui m’interdit toute mutilation et humiliation et emportai la semaine dernière le chat chez le vétérinaire. Parce que tout le monde est bien d’accord sur le raisonnement mais le vétérinaire c’est pour moi, normal j’ai l’habitude et les autres se défilent sous prétexte d’un surcroit de travail comme si je passais mes jours à bailler aux corneilles.

« C’est une intervention bénigne ! » me rassura le vétérinaire. Puisque l’homme de science l’affirme, c’est que ça doit être vrai et il ajouta « Vous verrez il sera plus casanier, plus affectueux, vous n’en avez qu’un ? Je dis ça parce que je fais des tarifs ! ». Plus affectueux… le mot me résonna sournoisement à la cervelle et je pensais à celui qui depuis des années envahissait mon existence mais je m’entendis dire « Non, je n’ai que celui-là ! ».

Depuis il me semble que Misti me fait la gueule mais il a de bonnes raisons pour m’en vouloir lui et avec le ci-dessus nommé rien n’a changé on continue à se faire la gueule, surtout moi je reconnais, en attendant la prochaine scène qui égaiera ma maison. J’aurai dû… je ne sais jamais saisir les bonnes opportunités.

vous connaissez le film avec Signoret/Gabin ?
Mais jamais je ne me vengerai sur un animal

Ah ben si ton mec ne te fais pas la gueule, c'est qu'il a échappé au massacre !
D'ailleurs, quelle(s) raison(s), aurais- tu de te priver de jouer aux boules ?
J'ai bien ri.

je préfère le tennis

Jouissif, comme tous tes récits !
Qui ne sont pas des récifs...
Où s'accrocheraient des moules !

Tu es partie à la pêche des vieux machins !

Comment des vieux machins !
Mais quand même !
Quelle modestie !